« Chacune votre enfant »
Je vous préviens, je vais ronchonner.
Il y a des grandes avancées dans le monde, dans la société.
Tant et si bien que ça fait toujours peur quand certains et certaines viennent à grands cris menacer des retours des siècles en arrière. Suivez mon regard…
Dans ce climat ambiant un peu bizarre, il faut le dire, où chacun à peur de tout ce qui est différent et se remet à regarder derrière son épaule, à ronchonner en disant que quand même hein, on a beau dire.. il y a des petites phrases qu’on croit sans importance, du « small talk » disent les anglo-saxons, mais c’est dans celles-ci qu’on mesure l’étendue de l’avancée qu’il reste à faire.
Oui, merci François, j’ai eu le droit d’épouser la personne que j’aime. Merci encore, même s’il reste encore un peu coincé dans le fond de la gorge celui là, on a eu le droit d’adopter nos enfants. Je suppose que tant qu’à faire, il faut que je remercie aussi pour les avancées antérieures qui font que je vis dans un pays où je ne reçois pas des pierres parce que j’aime une femme, et à un autre degré, que je remercie Dieu, ou plus simplement mes parents, d’avoir grandi dans une famille où je n’étais pas été mise à la porte non plus pour ça.
Mais…
Et c’est là que déjà ça commence, parce que certains diront « oui bah c’est bon hein faut pas trop en demander non plus quand même », permettez moi de râler quand même un peu.
Jusque là, mon corps était encore plein des hormones de la grossesse, je voyais tout sous un filtre rose barbie et j’avais la capacité de mémorisation d’une daurade alzheimérique, mais ! disais-je…
Je les ai notées toutes ces petites phrases qui minent toujours un peu le moral, celles à vous faire ressentir que quand même, on est pas arrivé.
Quand j’ai annoncé ma grossesse de jumelles, vous savez quelle phrase j’ai entendu le plus?
Non, pas « Félicitations !!! », pas non plus « Rhoo génial… », pas « Oh mon dieu la galère.. moi je pourrais pas.. » (pourtant bien placé en top de la liste).. Non..
Ce que j’ai entendu le plus, c’est « Rhoo… mais L. alors? »
Alors, ma première réaction, ça a été « Bah euh.. elle attend des jumelles aussi.. »
« Nan mais bien sûr.. mais vous ferez un 5e enfant après??? »
…
Alors là, je dois vous dire, j’en suis restée très perplexe.
Est ce vraiment normal quand quelqu’un vous annonce une grossesse de lui parler de son futur enfant?
Non, je ne le crois pas.
« Nan mais bien sûr, ce sont « ses » enfants aussi, mais tu comprends.. »
Et ben non, je comprends pas.
Je comprends pas, parce que la grossesse, phénomène aussi beau et magique soit il, ne fait pas la parentalité.
Il y a des milliards de preuve de ça dans le monde… comme l’adoption, ou tout simplement la paternité, non?… qui font qu’on peut complètement aimer, éduquer, être le parent à 1000% d’un enfant sans pour autant l’avoir fait grandir (et sortir) de son utérus.
Alors, on ne pense jamais à mal quand on dit des trucs comme ça, c’est sûr, mais ça pique.
« Nan mais tu comprends, avant c’était bien, vous aviez chacune le votre.. »
Ah bah ouais je suis con moi..
Des fois, j’en oublie de résumer le lien maternel à une simple propriété.
D’ailleurs chez nous c’est simple, on a fait monter un grand dressing de filles et on sépare bien nos affaires, les chaussures, les vestes, les culottes, les enfants, voilà, bien rangé, chacune son tiroir, c’est bien connu…
Et, gros avantage des couples de filles, on peut se prêter nos affaires hein, vu qu’on fait à peu près la même taille.
« Chérie, je t’emprunte ton pull gris et ta fille aujourd’hui d’accord? Elle ira bien avec mes chaussures »
J’en oublie que l’égalité qu’on prône en passe visiblement par des équations mathématiques et que notre famille n’en est visiblement moins une si on a pas expulser de son ventre un nombre strictement paritaire d’enfants.
Des fois j’oublie qu’être maman, ça n’a pas grand chose à voir avec une histoire de génétique, ou de vergétures, et je crois bêtement que c’est l’amour qui vous saute à la figure quand un petit bout vous serre un doigt dans la main, vous sourit quand vous approchez du berceau ou plus tard, vous dit « t’es pas beeelllle » quand vous l’envoyez dans sa chambre réfléchir un moment à ses bêtises.
Dans le même genre, bien sûr, on peut mettre toutes les questions (extraordinairement personnelles d’ailleurs mais que certains n’ont visiblement aucun mal à poser entre le fromage et le dessert.. ) du genre :
« Vous avez pu choisir le même.. euh.. enfin vous savez quoi..
– Donneur? Oui.
– Rhoo c’est super, ils sont vraiment frères et soeurs alors »
Ah bah oui c’est super.
Nan parce que sinon, ils n’étaient que frè ou soe?
Parce que partager les mêmes parents, la même chambre, le même tube de dentifrice, les mêmes histoires le soir avant de s’endormir, les mêmes vacances, les même bêtises dans la housse de couette pendant que les mamans nous croient endormis, les même coloriages sur les murs.. nan, ça, ça fait pas tout, j’oubliais.
Je manque toujours un peu de répartie immédiate, mais s’il y a bien un sujet sur lequel je ne laisserais jamais dire un mot de travers c’est celui là.
Certains l’ont compris à leur dépend et ont reçu un retour de balayette qu’il n’attendait sûrement pas. Parce qu’il ne pensait pas à mal.
Non, jamais.
C’est là où il reste le plus de travail à faire, parce que ce sont dans les petites choses, les petites phrases, dans les coins qu’il reste toujours de la poussière, des microbes. Le diable se niche dans les détails parait il.
Dans les petits mots, ceux qu’on dit comme ça sans réfléchir, c’est là qu’on lit parfois le mieux la pensée des gens.
Et.. qu’il reste beaucoup d’injustice et de chemin à faire.
En attendant, je vais continuer de répondre, d’expliquer, et de tracer notre route à la Brangelina (sauf que nous on fait du kite et toc 😉 ) et construire une famille avec un grand F, avec des petits blonds aux yeux bleus, d’autres aux yeux marrons verts, des filles, des garçons, nos lardons quoi..
Loin des considérations mathématiques et génétiques.
Et continuer de faire que la seule chose qui soit mathématiquement équitable chez nous, ce soit l’amour qu’on se donne.
tellement vrai
je porte notre second enfant, comme j’ai porté le premier
je vous raconte pas le nombre de regards interloqués, suivis de ptit silences génés, puis d’un « mais heuuu, elle voulait pas porter? » comme si c’était carrément « anormal » de ne pas avoir envie… Comme si elle ne connaitrait jamais la maternité du fait de ne pas porter!
Les ptites reflexions quand ils apprennent que oui, comme pour vous, c’est le meme « géniteur » (je ne laisse pas dire « pere », et j’essais de rester calme meme quand c’est la 100eme personne qui me sort ca)
Meme les mieux pensants viennent dire un ptit « ha supeeer comme ca ils sont vraiment freres et soeurs » :-O
« Parce que ma chérie, qui n’a pas de lien biologique n’est pas sa vraie mere? »
« mais non voyons, ce n’est pas ce que je voulais dire, c’est pas pareil, c’est vrai c’est pas important les genes mais quand meme c’est surement important pour eux blablabla »
Ha et une fois en soirée (j’adooore!) un abruti d’ami d’ami, apres avoir essayé de me démontrer par des exemples qu’il n’est pas raciste (il connait un arabe!) ni homophobe (il a dit à son pere que non, ce n’était pas pire d’etre enfant de lesbiennes que d’enfants de divorcés), il a fini son argumentaire un rien contradictoire par un « mais en tous cas nous, ca nous gene pas du tout »
« MERCI, mais j’en ai RIEN A F*** de ce que tu penses de moi ou de ma famille »
Je n’ai pas ajouté que par contre moi ca me génait beaucoup de parler avec lui, car il était vraiment pas malin ni interessant, et que j’avais un anniv à feter, et pas que ca à faire … Mais qu’il fallait bien « éduquer » les ignorants!
Je l’ai pas dis promis!
bref, je respire je reste calme ^^
Ayla.. 🙂 Respire 😉
Moi ma répartie de « je ne suis pas homophone » préférée c’était à un mariage « En tout cas, je dois vous dire, vous êtes quand même vachement jolies » (nan parce que tu comprends norlalement les lesbiennes c’est moche 😉
mdr mdr !
on y a eu droit aussi! surtout quand les gens qui me « connaissent » (vaguement hein) rencontrent Fanny! le choc ! genre « ha mais c’est une VRAIE fille??? jolie et tout »
mdr
J’ai pensé à vous hier vers 17h! aux toilettes du bureau j’ai du me retaper les explications pour quelqun qui dit « pere » au lieu de donneur (et qui quand je la reprend dit « ouii hooo donneur quoi tu m’as comprise » genre « tu chipotes » et qui était hyper jouasse que ce soit le meme donneur pour bébé 2 que pour S! Ha mais comme ca ils seront « vraiment frangins » genre à « 100% »
T’aurais été fiere de moi je suis restée hyper calme et souriante et je lui ai expliqué que pour nous ce qu’elle disait était completement à l’opposé de notre facon de penser et de voir les choses
Que ce n’est pas le but du tout, et que ce qu’êlle dit implique que les genes sont tres importants, et ce n’est pas le cas pour nous
Que ca voudrait dire que ma chérie n’est pas la « vraie » mere de notre fils, ou qu’elle le serait moins que moi… et là réaction « ha mais non pas du tout »
La ou j’ai eu ma petite victoire c’est qu’elle y a vraiment réfléchit et qu’elle m’a dit qu’elle n’avait jamais pensé à ca sous cet angle (j’ai bien répondu que c’ets normal car elle n’a pas eu l’occasion d’y reflechir et qu’elle a eu cette réponse « instinctivement » sans reflechir)
En me promenant de blog en blog je viens chez vous. Je suis une grand-mère (baby-boum!) donc je constate l’évolution de la société aussi bien humaine que technologique. Avec l’âge c’est plus laborieux, on s’adapte, par contre pour ma petite fille tout est simple, rien ne la surprend. Par exemple lorsque j’étais enfant il n’y avait pas d’enfants de divorcés dans ma classe, mon fils à divorcé après 3 ans de mariage, donc je m’adapte mais accordez moi que les schémas dans lesquels j’ai été élevés ont bien changés, je m’y fais mais c’est un peu déstabilisant. Par contre ce n’est pas de porter un enfant qui fait un parent aimant et attentif, c’est l’aimer et s’en occuper jour après jour pour lui permettre d’être un humain de bonne qualité et épanoui. Je souhaite une bonne route de vie à votre famille.